Télévision et convergence des médias : vers un nouvel Espace Public ?

2000-2005 : usages économiques et politiques de la Convergence.

Conditions d’acceptabilité des énoncés et des moyens de contrôle dans un cadre de communication dématérialisé.

Juin 2006


Ce document reprend le résumé de la thèse (500 pages) soutenue en Sorbonne le 13 septembre 2006.


Le principe de la convergence ou de l’intégration des médias, alliance de technologies autrefois séparées et association de capitaux attribués précédemment à des activités distinctes, constitue un fait de discours, utilisé par les acteurs du secteur audiovisuel pour désigner l’évolution de cette activité.

S’agit-il de la simple invocation d’une mana permettant de justifier des stratégies économiques peu claires, ou assiste-t-on à une transformation profonde des médias audiovisuels, à un changement de leurs modalités de fonctionnement, y compris au niveau textuel ?

 

Introduction

La télévision suscite une intense activité méta-discursive, tant dans la vie sociale que dans la vie savante, sur des positions souvent paradoxales. En effet, le dispositif semble plus important que l’objet produit : Il permet toujours d’engendrer des pastiches, des parodies, des jeux sur le code. C’est donc la réception, comme lieu de la visibilité, qui serait le lieu de la motivation et de la production du sens, susceptible de nouvelles combinaisons ludiques en fonction des usages sociaux et des possibilités techniques.

Ce modèle de spectateur joueur et producteur est déjà à l’œuvre dans le cas des jeux vidéos ou d’Internet : ce n’est plus un téléspectateur qui se joue de l’enfermement, mais un spectateur qui déjoue le contrôle. Plus qu’un changement de média, il s’agit de souligner un changement de modèle.

Le passage de médias électroniques à des médias informatiques passe par des transformations procédurales (portails, moteurs), où le décodage des filtres importera peut-être plus que les catégorisations, même si elles ne vont pas forcément faire disparaître celles-ci.

Précisément, l’informatique permet d’employer les réseaux de télécommunication ou de télédiffusion pour l’un ou l’autre usage : les autoroutes de l’information deviennent une sorte de nouvelle frontière mondiale derrière laquelle se redessinent les contours des entreprises de communication. Ces nouveaux usages impliquent, en effet, la dérégulation du secteur.

En France, des entreprises liées aux marchés publics vont dissocier leur image de ces activités (la distribution des eaux, le BTP, le ramassage et le traitement des déchets) pour l’associer à leurs activités audiovisuelles et téléphoniques plus valorisantes et susceptibles d’un plus grand développement.

Or, en cinq années, un secteur promu comme un formidable espace de création, de communication et de liberté devient un des lieux les plus encadrés légalement, au prix d’innovations juridiques parfois très fortement contestées dans l’espace public. À partir du Livre Vert sur la convergence présenté par la Commission européenne fin 1997, va se mettre en place, à partir de 2000, un droit spécifiquement adapté à la convergence dans le domaine économique et dans le domaine du droit des marques et du droit d’auteur. La référence à l’évolution des médias sera également systématiquement invoquée sur cette période dans le domaine social et pénal.

Le marché des plates-formes convergentes va se développer à partir de 2005, en particulier à travers des offres intégrant téléphonie, télévision, téléchargement vidéo à la demande et accès Internet, accessibles aussi bien depuis un téléviseur que depuis un ordinateur, ou depuis un téléphone mobile.

Or, ordinateur et mobiles intègrent également des moyens d’édition et de prise de vue, contribuant à rendre réversibles les positions de spectateur et de créateur, ce qui modifie également les frontières de la vie privée. Si chacun peut devenir « offreur », le modèle même des industries culturelles deviendrait peut-être caduc.

La logique de réseaux de distribution fermés, délimitant des marchés caractérisés par des formes de contingentement, dans un principe d’offre, s’effacerait au profit d’un marché où la demande serait déterminante. Mais entrer dans une logique où la demande est déterminante, donc changer le statut pragmatique des téléspectateurs et des consommateurs, entraîne par corrélation une modification du statut symbolique des producteurs de biens culturels.

En entrant dans une logique de demande, le marché des biens culturels se rapproche en outre des enjeux de l’espace politique : contrôler la demande, surveiller les usages pour pouvoir les anticiper. La dimension privée, inobservable et irrépressible, libre, de la consommation par rapport à l’offre, disparaît : les moyens techniques liés à la dématérialisation des contenus permettent de la suivre de très près. La sphère privée semble donc menacée d’un point de vue marketing, ce que l’on pourra vérifier également d’un point de vue politique.

Aborder la question de la convergence impliquera donc d’envisager les questions de statut symbolique des objets culturels, de construction de leur énonciateur et de visibilité de l’énonciataire, d’évolution des positions stratégiques d’un point de vue économique, de changement dans la réglementation, et d’évolution des lois liées aux questions d’expression publique et de vie privée.

Dans cette perspective, nous aborderons, en particulier, les fonctions possibles d’une catégorisation de l’influence des médias en terme « d’ères » ou « d’âges » : une nouvelle ère, ce sont aussi de nouveaux usages, dont certains illégaux le plus souvent, comme le téléchargement musical. On observe un glissement vers la pénalisation d’un grand nombre d’actes : on retrouve l’occurrence politique suivant laquelle le manque d’affirmation de l’autorité serait la cause des dérives, entraînant un manque de responsabilité des nouveaux usagers. Cette question de l’autorité, de sa représentation et de son affirmation, de sa mise en jeu dans les médias, de son évolution en fonction des médias dominants, semble donc centrale.

Comme la culture, le champ politique est un lieu de production de biens immatériels : ces contenus doivent se matérialiser pour rentrer dans une économie où les bénéfices sont réversibles.

Les principales polémiques dans l’espace public sur cette période, sur les questions de génération, de racisme, de « communauté », de violence nous aideront aussi à préciser la dimension énonciative des effets de pouvoir dont les médias et la convergence sont, à la fois, le théâtre, l’enjeu, et peut-être la cause.

 

La convergence entre médias et télécommunications entraîne-t-elle une dissolution de l’espace public et des espaces privés en une multitude d’espaces à la fois privés et publics ?

Si le livre, la presse, les médias imprimés ont permis la structuration démocratique de notre espace politique, le développement des médias électroniques entraîne-t-il sa transformation ?

Les particularités esthétiques et communicationnelles de la télévision correspondent-elles alors à une forme de transition ?

L’ensemble de ces questions occurrentes, parfois énoncées sur le ton de la prophétie, dans d’autres cas sur celui de la catastrophe, ne sert-il pas avant tout de prétexte dans le jeu des rapports de force économiques et politiques qui s’expriment notamment dans les évolutions réglementaires et juridiques ?

 


 

1.   Aspects symboliques

Transformations normatives

La question des effets sociaux, économiques et politiques des technologies émergentes renvoie elle-même à la séparation entre les espaces de l’usage, de la production et de la régulation. La redistribution de capitaux par l’État dépend, par exemple, directement de ses propres recettes fiscales. Le retour financier des entreprises, leur performance économique, leur capacité de vente, dépendent de l’usage qui sera fait de leurs produits. Ce retour implique que leurs marchandises aient un statut symbolique compatible avec celui de marchandise.

Les technologies nouvelles peuvent remettre en cause ces statuts, en particulier dans le cas de contenus culturels, susceptibles d’être échangés directement entre usagers à l’échelle mondiale, grâce à la numérisation et l’interopérabilité des différents réseaux, des différents supports, des différents terminaux.

L’usage des médias de masse a été longtemps décrié comme relevant d’une attitude passive, basée sur un radical fossé technique, économique et social entre usager et producteur. Pourtant, de nouvelles pratiques d’appropriation apparaissent, tant du point de vue de la consommation que de la constitution d’espaces critiques et culturels : la facilité de publication, la capacité d’accès aux documents et aux commentaires, l’intégration des références dans un texte, la citation des sources, autant de traits de la culture savante qui relèvent maintenant d’un usage ordinaire, court-circuitant les médiateurs habituels, journalistes, éducateurs, experts, qui ne fondaient leur crédibilité que sur leur position énonciative et institutionnelle.

Réappropriation, travail contributif, échanges entre pairs et désintéressement donnent une nouvelle dimension à un régime de gratuité qui n’existait, jusqu’à présent, que dans la sphère privée ou dans des institutions restreintes. La question du statut juridique et social de ces échanges demeure encore largement ouverte : braconnage ou piratage ?

La coupure entre instruments de communication privée et moyens de publication collectifs apparaît de moins en moins nette dans les usages culturels. La convergence n’est donc pas seulement un artifice technique : intégrer moyens de communication et moyens de publication dans les mêmes instruments semble modifier irrémédiablement leur usage, le statut de leurs énoncés et leurs conditions de contrôle.

La contestation politique devient également plus ouverte : il est relativement facile de contrôler une catégorie sociale précise de médiateurs utilisant des supports et des institutions clos (journal, télévision, université…). La possibilité pour chacun de publier, d’écrire, voire de prendre et de diffuser des documents audiovisuels, pour dénoncer des répressions indues par exemple, semble rendre caduques les censures d’État par contention de l’information.

Les campagnes d’opinion peuvent ainsi atteindre une visibilité inégalée : les campagnes d’associations civiques ou environnementalistes contre des multinationales sont même parvenues à entraîner un réajustement de la jurisprudence sur le droit des marques commerciales, autorisant le fait de les parodier, alors que le droit des marques et le marketing visent à figer leur forme et leur attribution symbolique.

Le statut des marques et des énoncés commerciaux, régi par le droit industriel, se rapprocherait-il du régime commun ?

 

2.   Dimension énonciative

Occuper l’antenne, s’imposer sur les réseaux

La question du statut des énoncés doit être précisée : la télévision, dans son principe de diffusion linéaire, procède à la fois de principes de poly-énonciation, de principes d’énoncés « gigogne », comme la publicité qui entoure un stade entouré de supporteurs entourés par la télévision, et de principes de séparation : les énoncés à caractères politiques et publicitaires font l’objet d’une réglementation spécifique. Maîtriser la parole et monopoliser l’antenne, dans cette perspective de rareté des canaux disponibles, constituent l’enjeu de luttes intenses, tant au niveau réglementaire et économique que pour ceux qui interviennent à l’écran.

C’est également un enjeu important pour les télévisions publiques, et pour tous les créateurs revendiquant une certaine liberté, à la fois vis à vis des contraintes économiques, et vis à vis de l’encadrement juridique de la production audiovisuelle.

Or, les règles qui régissent l’identification de l’énonciateur sur Internet sont encore en cours de mise en place, la question de son attribution étant elle-même au cœur des luttes entre défense d’un espace où chaque émetteur est légalement défini, promotion d’un espace commercial où chaque identité peut être acquise aux enchères, et maintien d’un espace d’anonymat et d’identification volontaire, sur le principe des pseudonymes qui régissent l’attribution des rôles sur le minitel, dans les chats ou dans les univers virtuels.

 

Le festival international de publicité de Cannes, en juin 2006, a ainsi consacré l’importance des campagnes de publicité et des spots intégrant les logiques de réappropriation des consommateurs, suivant un principe viral proche des méthodes employées dans campagnes d’opinion par des organisations militantes : il est proposé à ceux qui souhaitent participer à ce type d’opération d’en relayer les messages ou les spots par Internet ou par vidéo mobile, tout en produisant leurs propres occurrences en investissant les éléments proposés pour la campagne. Nike, Burger King, Wilkinson, Adidas, entre autres marques, ont repris en 2005 et 2006 un principe que Greenpeace avait initié dans son opération « dites-le avec des bulles » en 2003, en demandant alors à chacun d’envoyer à la direction d’Esso sa photographie accompagnée d’un slogan de Greenpeace reporté sur un carton à la façon d’un phylactère.

 

3.   Enjeux économiques

Les portails : contrôler la diffusion des contenus et des biens

Dans le cas d’Internet, nous nous situons dans une perspective d’explosion du nombre de « canaux » : l’élément éditorial et économique déterminant, c’est le portail, le moyen de recherche, de choix et d’accès vers les différents émetteurs.

Face au problème de la multiplication et de la diminution tant de leur audience que de leur influence, une solution pour les chaînes de télévision consiste à capitaliser et investir leur image dans les nouveaux médias : diffusion sur téléphone mobile, portails Internet.

L’aboutissement de cette logique, jointe aux limites et à la dilution de la publicité, amène les chaînes à passer du statut de support promotionnel à celui de support de vente : le télé-achat peut devenir la modalité dominante, l’interactivité autorisée par la convergence pouvant, par exemple, permettre de lier directement programme audiovisuel et processus d’achat.

Quand cette logique de vente rejoint celle de la diversification vers l’ensemble des médias compatibles avec l’image de marque de la chaîne et susceptibles de toucher ses téléspectateurs, on assiste au développement commercial de tous les produits qui peuvent être dérivés de l’image ou de l’activité de la chaîne.

Ainsi, le problème de l’extension de la consommation gratuite dû à la dématérialisation des contenus peut, en partie, être dépassé : les programmes n’ont plus pour fonction que d’être les vecteurs des marchandises ou des services proposés par la chaîne.

Néanmoins, la surqualification des émetteurs peut poser de nombreux problèmes communicationnels, en particulier pour les portails Internet : l’origine d’un énoncé est en soi beaucoup plus difficile à déterminer sur Internet que dans le cas de la télévision. Un portail, en ouvrant vers d’autres sites, vers des offres de services et de vente, est-il viable s’il doit en même temps répondre de tous les contenus éditoriaux possibles vers lesquels il peut pointer ? D’autant que l’option économique la plus rentable consiste à mettre en place des offres dont les usagers, grâce aux processus d’appropriation évoqués, apportent eux-mêmes les contenus.

La logique de concentration des groupes de communication, basée sur le contrôle des catalogues et des canaux de diffusion, atteint certainement ses limites dans le cas d’échanges dématérialisés, d’où peut-être l’acharnement des représentants des industries culturels pour obtenir le renforcement des contrôles légaux sur la circulation des biens culturels, comme on a pu la voir en France dans le cadre des discussions sur la loi sur le Droit d’auteur dans la société de l’information entre décembre 2005 et juin 2006.

Or, la notion même d’œuvre, dans une certaine mesure, relève d’une logique de rationalisation de coûts logistiques, par un investissement financier et marketing massif sur un nombre réduit de biens culturels. Les sites de téléchargement se distinguent des offres traditionnelles en mettant simultanément sur le marché un très grand nombre de produits.

 

4.   Interventions réglementaires

L’encadrement des contenus et la qualification des destinataires

La question de la responsabilité éditoriale a précisément donné lieu à un encadrement très rigoureux de l’activité de télévision. Cette attention s’est exercée en particulier au nom de la protection de l’enfance contre les programmes violents ou trop sexuellement explicites, supposés traumatisants et / ou incitatifs.

La télévision, et plus encore Internet, posent en effet le problème du contrôle de la circulation de l’information, non seulement au niveau des États, mais aussi au niveau des familles et des institutions éducatives, donc de la définition de la séparation entre espaces publics et privés.

Les possibilités de rétention du savoir permises par la forme des livres imprimés devenant caduques, la réglementation y suppléerait. Or, la définition même de l’enfance est peut-être liée à l’extension de l’enseignement basé sur les livres et aux caractéristiques sociales de la société industrielle. Cette hypothèse explique, sans doute, l’extrême tension autour de cette question dont témoigne la multiplicité des rapports et des ouvrages relatifs aux médias et à l’enfance face à la violence.

Une apologie des institutions coercitives disparues dans les années 1970 réapparaît, tant dans l’espace des médias (les lieux clos, dont le modèle est le pensionnat, forment des espaces narrativement productifs dans le cadre d’expériences de télé-réalité), que dans l’espace législatif à travers la remise en avant des vertus des institutions d’enfermement traditionnelles basées sur la discipline, la séparation, l’uniforme, les contraintes et les châtiments corporels.

La notion de « changement d’ère », évoquée à propos de la convergence, se retrouverait alors peut-être confirmée par ces interrogations sur le statut de l’enfance et le rôle de la famille. On peut néanmoins se demander jusqu’à quel point ces mesures réglementaires et les discours qui les soutiennent ne relèvent pas, avant tout, d’un simple espace d’énonciation du pouvoir, y compris pour les groupes de pression impliqués dans la protection de l’enfance.

En l’occurrence, il est frappant d’observer la similitude des arguments avancés pour la protection de l’enfance, face à la télévision et face à Internet, comme autant d’actualisations des mêmes positions adaptées en fonction de l’actualité des évolutions techniques.

Internet se voit ainsi paré d’une aura de dangerosité qui justifie, non seulement l’encadrement juridique de la production et de la diffusion d’énoncés publics, mais aussi celui de leur consultation et de leur réception privée.


 

5.   Conséquences juridiques

Droit, vie privée et institutions de régulation

On voit apparaître, à l’occasion de la convergence des médias, de nombreuses évolutions majeures dans le droit français et dans le rapport du gouvernement aux institutions judiciaires : autorisation des interrogatoires captieux, mise en cause de la constitution et des plus hautes juridictions, mise en cause de la responsabilité des juges, privatisation du contrôle d’Internet.

Il est assez remarquable que ces retours à des situations juridiques antérieures aux Lumières se fassent à l’occasion de la convergence, comme la confirmation d’un changement d’ère vers une ère nouvelle qui ne serait peut-être plus construite sur la référence à l’écrit et à un idéal d’universalité. Alors que tous les lecteurs étaient égaux et susceptibles d’exprimer leur jugement, tous les téléspectateurs ne le sont peut-être pas.

Les arguments politiques qui soutiennent ces évolutions sont, en effet, extrêmement liés à l’actualité, à l’information diffusée par les médias, en premier lieu la télévision, et à ses logiques rhétoriques propres, comme la mise en avant des victimes.

La question demeure de savoir si les nouveaux médias, en associant écrit et audio-visuel, en ouvrant les positions d’auteur et de lecteur, de sujet et d’objet, ouvrent de nouveaux espaces démocratiques et culturels ou si l’inquiétude, face à cette ouverture, ne sert qu’à justifier la contention d’institutions qui auraient de plus en plus besoin de la répression pour se maintenir.

Plus que jamais, la définition du pouvoir semble être de parvenir à imposer ses discours, comme des énoncés vrais et susceptibles de régler les problèmes du destinataire dans son espace de réception. La légitimité comme l’émotion ne sont que les produits d’une stratégie de discours, socialement orientée suivant les intérêts de l’énonciateur, l’objet de son efficacité étant précisément d’assurer son énonciataire de l’inverse, d’accréditer le sacrifice de son intérêt ou de son point de vue égoïste au point de vue du groupe, reconnu dans sa valeur et comme fondateur de toute valeur. Or, pour le destinataire, l’enjeu est aussi de profiter des effets du pouvoir en fonction de ses propres intérêts, tout en assurant le destinateur de l’inverse.


 

Conclusions

On observe trois cas de figures, en matière de contrôle de la circulation des énoncés, qui correspondraient essentiellement à des postures de communication, déterminant l’importance des espaces de production et de réception afférents.

La légitimité de l’émetteur et du récepteur peut tenir au partage de référents communs. Celle de l’émetteur, dans une logique d’offre, tiendra à une sur-valorisation de sa qualification et à la construction de marchés fermés. Le passage vers une logique de demande modifierait alors à la fois les conditions de viabilité économique de la production de biens culturels et l’exercice des contrôles politiques.

Logiques d’offre et de demande :

Vers une inversion des logiques de rétribution du marché des biens culturels.

Dans un cadre dématérialisé, la principale question, aussi bien symbolique qu’économique, est celle de la rematérialisation des biens culturels.

Le rapport de l’individu aux contrôles, du fait de la nouvelle visibilité des usagers dans leurs pratiques culturelles, s’inscrit dans cette dialectique de l’apparition et de la disparition, le droit à l’image (et le droit à la disparition) évoluant parallèlement au droit d’auteur (et à la liberté d’expression).

Dans une logique d’offre, il était important de se faire un nom : dans une logique de demande et de contrôle, logiciels ou sites d’anonymisation doivent permettre de le défaire. La résistance contre un pouvoir disciplinaire impliquait d’imposer sa propre autorité : dans une société de contrôle il importerait d’imposer sa qualité de lecteur anonyme.

 Le récit de la convergence serait alors à lire comme la fiction pragmatique du rapport de la représentation au politique : plus qu’une improbable leçon d’histoire et de prospective, les discours sur l’évolution des médias nous donnent comme exemple leur propre écriture, la grammaire des discours polémiques doublant la grammaire de la langue, la grammaire des médias, la grammaire du droit, la grammaire de l’économie et la grammaire de la société.

L’enjeu de la Convergence est peut-être bien de ne plus simplement étudier nos cadres réflexifs par l’analyse de leurs représentations, mais de les éprouver en étant soi- même un acteur, un joueur.

 


Pour le texte et la mise en code HTML: © christophe lenoir 2006

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